ADO SATO
L’oeuvre d’Ado est spatial et cosmique, à l’instar d’une part importante du mouvement abstrait dans les années 60-70. Les nouveaux univers sensoriels, les recherches musicales, les réseaux de l’électronique ont influencé considérablement le langage formel des plasticiens et designers, deux termes qui apparaissent d’ailleurs à cette époque dans le langage commun. L’ère du « tout plastique » a développé les formes lisses et courbes, les couleurs sont vives et brillantes. Dans un esprit proche de la science-fiction, les gélules, coques, bulles et autres formes compactes ou bombées font irruption dans le décor du quotidien, nées d’une volonté d’apporter des solutions nouvelles au confort et à l’ergonomie du mobilier : pour ne s’en tenir qu’à la France, on se souvient de la relecture du classique fauteuil Voltaire en coque plastique version « Culbuto » par Marc Held pour Knoll, des fameuses chaises longues « Djinn » d’Olivier Mourgue décorant le plateau du film « 2001, Odyssée de l’espace » de Stanley Kubrick, le confort futuriste des appartements privés du président Pompidou à l’Elysée redessinés par Pierre Paulin, ou bien encore un ensemble mobilier en polyester moulé « Cryptogamme » qui épousait le profil simplifié d’un champignon, mis au point par Roger Tallon à l’Atelier de Recherche expérimentale du Mobilier National. Dans le domaine architectural, on pourrait citer également les recherches d’habitats cellulaires et monoblocs par des créateurs d’anticipations tels que Ionel Schein, Antti Lovag ou Jean Maneval… Un regard rétrospectif plus complet sur le design d’avant-garde à ce tournant des années 70 confirmerait l’incroyable osmose de la peinture d’Ado avec l’esthétique industrielle de son temps.
Ado privilégie toujours la sensation plastique à une transcription directe du réel, car il emploie des techniques visuelles comparables à celles d’un designer graphique, dont le projet vise à la compréhension immédiate du plus grand nombre. A la fin des années 70, son vocabulaire abstrait s’ouvre progressivement à la notion de paysage et de portrait, toujours sous une forme synthétique et dans un strict cadrage photographique, avec détourage systématique du contexte réaliste : la répétition en forme d’hommage à la silhouette iconique d’Elvis Presley, des alignements d’immeubles ou de monuments parisiens inscrits dans une découpe de ciel, des tubes-totems annelés évoquant la prolifération du végétal, un arc-en-ciel et un nuage enfin, qui apportent une contribution atmosphérique aussi originale qu’irréelle due à leur résolution plastique approchant l’archétype, tel un logotype. La mire de couleur – étalonnage indispensable aux tirages sur papier du photographe – apparaît en leitmotiv dans la partie inférieure de certaines œuvres, à la manière du commentaire illustré d’une prédelle dans les rétables du Moyen-âge. L’artiste inscrit sur sa toile la trace assumée d’une pratique photographique passionnée, précédant couramment sa peinture dans le repérage de nouveaux thèmes naturalistes urbains.
Les peintures d’Ado Sato sont contemplatives et secrètement inquiètes, imprégnées d’une mystique du silence et du dépouillement de l’âme. On pourrait en imaginer presque les vertus thérapeutiques… Elles pointent avec obsession la capacité particulière de l’homme contemporain à capter les éléments les plus concrets comme s’il s’agissait de messages subliminaux qu’il sait interpréter comme autant d’états psychologiques latents, pressentant que ceux-ci stigmatisent d’infimes instants arrêtés de sa tragédie intérieure. De telles œuvres laissent au regard d’aujourd’hui une impression d’élasticité tonique et de force de vie communicative.
Eko Sato, galeriste à Paris et fille de l'artiste, offre a l'origine le visuel de son père pour un des posters du projet IK's diary at momo.
Cette série de posters collectionnés par les milles destinataires a été exposée de Paris à Londres jusqu'à Tokyo. Aujourd'hui, Ich&Kar réédite l’œuvre du peintre en affiche au format 50 x 70 cm.